RITE FRANCAIS MODERNE

RITE FRANCAIS MODERNE
INSTRUCTIONS 
DES HAUTS-GRADES
– 1816 –
Tels qu’ils se confèrent dans les Chapitres de la correspondance au Rite Français Moderne
Travaux et Recherches historiques par Christian de  BONFILS
Recherches et Mise en page par Joseph CASTELLI 
ÉDITIONS MAÇONNIQUES © 2019

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CONTENU SYMBOLIQUE ET RITUELS DES ORDRES DE SAGESSE DU RITE FRANÇAIS 

Tiré du fonds traditionnel du Rite codifié en 1785 et modernisé au réveil du G:.C:.G:., en 1999, il comporte, comme nous l’avons vu, une progression en 4 étapes.
Quelles sont ses idées force ?
Il rappelle d’abord que les deux premiers grades Apprenti et Compagnon de la Maçonnerie bleue sont consacrés à l’acquisition de la Maîtrise de l’Outil Maçonnique ; et c’est seulement quand il est en pleine possession de l’outil que le Maître peut agir efficacement sur lui-même et la société.
Les 4 ordres suivants sont alors destinés à l’action, action rendue féconde par la qualité de l’outil forgé dans les 3 premiers grades. L’utilisation de l’outil va être mise en valeur successivement dans les 4 domaines, correspondant chacun à l’un des 4 ordres. Ces domaines sont symbolisés et ritualisés dans des scénarios tirés de l’histoire d’HIRAM et celle du TEMPLE de SALOMON.
Le 1er Ordre – Élu  : de la vengeance à la justice.
« Il faut venger HIRAM », ou plus exactement que la justice s’exerce envers ses assassins. Retrouver, juger et punir les assassins du Maître tel est le fil rouge du 1er Ordre. Quand règne la justice, alors la vérité est satisfaite et la paix peut s’établir : paix intérieure de l’homme, paix dans la société, dans la cité, paix entre les nations. Au 1er Ordre le Maçon travaille à l’établissement de la justice dans tous les domaines. En établissant la justice, nous construisons la première étape vers l’épanouissement de l’Homme.
Le 2ème Ordre – Grand Élu Ecossais :
SALOMON unit divers éléments de la connaissance, pour les fondre en un bloc unique, la pierre cubique en agate. On passe ici à l’union à l’unité, de l’union des Hommes à l’unité des valeurs. En effet l’un des objectifs des Maçons est de travailler à la réalisation de l’union des Hommes. Mais, sous des apparences vertueuses l’union peut cacher des objectifs contradictoires et même opposés. L’union peut aussi être faite dans un but pervers : les mauvais Compagnons assassins d’HIRAM ont réussi leur forfait car ils étaient unis. L’union ne peut être féconde que si elle tend à réaliser l’unité des valeurs, c’est à dire si elle travaille à l’adoption de valeurs universelles, valeurs portées par l’Humanisme maçonnique. Dans les rituels originaux, ce thème est illustré par la recherche de la connaissance et sa découverte, connaissance symbolisée par un bijou précieux qu’HIRAM aurait porté. Travailler à réaliser l’unité des valeurs, tel est l’objet du 2ème Ordre.
Le 3ème  Ordre – Chevalier D’orient ou de Chevalier de l’Épée :
Il effectue le passage de la Symbolique Opérative à la Symbolique Chevaleresque. Cet ordre est dominé par le thème de la reconstruction, celle du Temple de SALOMON après l’exil de BABYLONE. Les Maçons libérés par CYRUS retournent à JERUSALEM et reconstruisent le Temple en tenant la truelle d’une main et en ayant l’épée à portée de l’autre.
Deux enseignements forts sont contenus ici : d’une part aucune construction n’est jamais définitive, l’histoire humaine est celle d’un ternaire perpétuel :
CONSTRUCTION – DESTRUCTION – RECONSTRUCTION.
On notera que ce schéma rejoint celui des Alchimistes pour qui tout se déroule selon le processus de :
GENERATION – PUTREFACTION – REGENERATION.
D’autre part, en gardant l’épée à nos côtés, nous devons nous rappeler que les valeurs acquises sont toujours menacées et qu’il convient d’être toujours prets à se  battre pour les défendre. La reconstruction est donc le thème principal du 3ème Ordre.
Le 4ème Ordre – Parfait Macon Libre, Souverain Prince R + C :
Ainsi après avoir parcouru les trois premières étapes : établir la justice, travailler à réaliser l’unité des valeurs, reconstruit, le Maçon peut espérer s’épanouir dans une société juste et éclairée, en Homme libéré, donc libre. Libéré des obstacles imposés par la nature extérieure hostile, libéré des contraintes qu’il rencontre à l’intérieur de lui-même. À cette libération effectuée, à cette liberté conquise, répond, en miroir l’enseignement du 4ème Ordre consacré à l’épanouissement de l’Homme dans une société dont les structures et le fonctionnement permettent la réalisation de cet idéal. On ne manque pas alors de noter que la première lettre de chacun des quatre ordres du R:.F:. :
J de JUSTICE, U de UNITE, R de RECONSTRUCTION et E de EPANOUISSEMENT, forment assemblées le mot « JURE », rappel du serment du Maçon accompli.
Le C:.K:.S:. dans la Franc-Maçonnerie :
C’est une pomme de discorde entre le Rite Français et le Rite Écossais Ancien et Accepté. Ce sujet suscita dans le passé et encore aujourd’hui, beaucoup de passions et controversés.
Ne fut-il pas la cible favorite de l’antimaçonnisme du XXème siècle pour discréditer la Franc-Maçonnerie tout entière ?
Notre étude, centrée sur la Franc-Maçonnerie, débutera par l’historique et les bases caractéristiques de la structure du Grade, se poursuivra par le contenu dominant dans le domaine de l’imaginaire et de la Symbolique Maçonnique, et se terminera par les caractéristiques, les fondements de ce sur quoi porte l’initiation du C:.K:.S:..
Le KADOSCH est d’origine hébraïque et s’écrit QADOSH en hébreu. Autrefois le terme désignait les prêtres dévoués à certains rites sacrés dans le temple, les « KADESHIM ». Il signifie « SAINTETÉ, SAINT-SACRE », c’est à dire « sans souillure » et de ce fait « séparé » , vocabulaire qui a longtemps alimenté la théologie biblique et fortement ancré l’expression de toutes les religions.
Au Musée de Vienne (Autriche) se trouve une médaille qui représente DANTE ALIGHIERI (Florence, 1265 Ravenne, 1321). Au revers figurent les lettres F:.S:.K:.P:.F:.T:. qui voudraient dire « FRATER SACROE KADOCH IMPERIALIS PRINCIPATUS FRATER TEMPLARUS ».
Certains exégètes prétendent qu’il faut lire FIDEI SANTA KADOCH.
L’association de la FEDE SANTA dont DANTE semble avoir été l’un des chefs était un Tiers ordre de filiation Templière, ce qui justifierait l’appellation de FRATER TEMPLARUS et ses dignitaires portaient le titre de KADOSCH (Source : RENÉ GUENON).
Le KADOSCH (ou QADOSH) apparaît dans nos Rituels Maçonniques vers 1760 à METZ.
Avec le grade de R + C (le signe, le contresigne, et le sens hermétiste de I:.N:.R:.I:.), le C:.K:.S:. (l’échelle) constitue le 2ème palier essentiel de la série des grades écossais que d’aucuns prétendent « le NEC PLUS ULTRA » de l’Initiation Maçonnique, le « PARFAIT INITIE » en s’élevant à la connaissance de l’univers et des Dieux.
La première forme avérée à ce jour d’un grade de KADOSCH a été rencontré historiquement en 1750.
Certains historiens (KERVELLA et LESTIENNE) rappellent qu’il s’agit d’un grade d’ELU (Élu Zélé qui mit à mort ABIRAM, le Compagnon scélérat mythique qui était censé avoir assassiné l’Architecte et Constructeur du Temple de SALOMON), grade connu à POITIERS et à QUIMPER, et dont la mouture manuscrite et retrouvée à QUIMPER contient explicitement le terme de KADOSCH.
Sur cela, se greffe la légende caractéristique du grade, selon laquelle depuis la nuit des temps, de PTOLÉMÉE, via les « ESSÉNIENS » et les descendants juifs devenus Chrétiens à qui ils avaient confié leurs secrets, on conserva ces derniers jusqu’à ce que l’art finît par déboucher sur le rôle joué par les TEMPLIERS, sur leur union avec les « CHEVALIERS de SAINT JEAN de JERALEM », au temps des croisades .
De leur repli en Écosse, ils conservèrent dans leur descendance initiatique une grande « amitié fraternelle » entre eux, même    si certains quittèrent l’église catholique pour adhérer au « LUTHERIANISME » ou au « CALVINISME ».
Le grade de KADOSCH, présent dans bien d’autres rites, a pris de nombreuses formes depuis le XVIIIème siècle en Angleterre, sur le Continent et aux Amériques. Son étude permet d’abord d’aborder la complexité de son évolution et elle éclaircit la place qu’il occupe dans la Franc- Maçonnerie d’aujourd’hui.
Indicateur de la culture du temps, le KADOSCH ne laisse pas indifférent. Il a été un Chevalier vertueux du passé et demeure un homme de ce monde, un missionnaire, par le regard qu’il porte sur la Cité.
Dans ses débuts, vers les années 1760/1761, le grade de KADOSCH était purement chrétien, une paraphrase symbolique du lévitique construit autour d’une échelle mystique, comme il en existait beaucoup dans la tradition chrétienne. L’échelle de JACOB en est un exemple significatif.
L’action que proposait le grade était de « faire son salut ».
S’il en était resté là, on peut supposer qu’il ferait partie aujourd’hui de tous ces grades pseudo Écossais largement oubliés et remisés aux oubliettes de l’histoire.
Mais le KADOSCH a connu bien des avatars, des vicissitudes et au cours de son histoire mouvementée au XVIIIème et XIXème siècle, nombreux ont été ceux qui ont voulu lui donner un objectif concret, venger l’Ordre du Temple, soutenir sa philosophie politique et promouvoir au nom de la tradition un gnosticisme dépassé. Il faudra attendre les dernières décennies pour que ce grade devienne purement initiatique (le seul des Hauts-Grades), et que le Récipiendaire entende son instructeur lui dire : « Allez dans le monde, seul, univers complet, responsable devant votre conscience, riche de connaissance et d’amour. Nous n’avons pas de mot d’ordre à vous donner ».
À la fois recherché et rejeté selon les courants culturels qui traversèrent la Maçonnerie, recherché parce qu’on lui a très vite attribué un pouvoir ésotérique considérable, mais aussi rejeté parce qu’il a paru, aux yeux de certains, surtout d’obédience catholique romaine, comme étant exécrable puisqu’il attaquait non seulement la royauté française en la personne de PHILIPPE LE BEL, ce qui eût pu être compréhensible voire acceptable, mais surtout la papauté, en celle du Pape CLEMENT V.
Historiquement, on connaît la réussite économique de l’Ordre des Templiers, envoyés en PALESTINE à l’invite de SAINT BERNARD, et missionnés à garder le tombeau du Christ, en occupant, de 1135 à 1140, un édifice élevé sur les ruines de l’ancien temple d’ISRAEL à JERUSALEM. Ils tissèrent un solide réseau dans le monde chrétien d’Occident jusqu’en Terre Sainte et ils firent l’admiration de ceux dont ils assuraient la protection. Mais ils firent aussi l’envie de la Royauté Française désireuse de s’approprier les richesses accumulées.
On connaît le procès inique intenté contre eux au profit de PHILIPPE LE BEL guidant sa conduite à son obligé BERTRAND de GOT, devenu le Pape CLEMENT V.
Arrêtés, emprisonnés, torturés, certains Templiers finirent par être exécutés. Le Grand Maître de l’Ordre, JACQUES de MOLAY, périt sur le bûcher, à PARIS, en Mars 1314.
Gloire ou aversion profonde, le KADOSCH a prêté à tous les engouements comme à tous les rejets. En tout cas, il n’a pas laissé indifférent les Maçons après qu’il a eu émergé dans la panoplie rituélique.
Recherché ou haï, il a marqué les individus de façon tranchée, un peu comme serait sa nature « traditionnelle » quand on lui attribue le statut de grade d’action ou il faut, après réflexion, décider et faire ou ne pas faire, dans l’univers binaire ou tout serait, de façon un peu simpliste, blanc ou noir, comme l’est le cordon du KADOSCH ou se rencontrent emblématiquement ces deux « couleurs ».
Comme nous l’avons vu, l’origine du grade de KADOSCH demeure incertaine et obscure.
Son titre et une partie de son symbolisme le rattache à la Chevalerie , de « CABALLARUS » en vieux français, ordre initiatique en 4 degrés (le Page l’Écuyer  le Poursuivant d’armes et le Chevalier porteur de l’épée et du poignard) qui ne se confondait pas avec la Noblesse, et qui constituait une dignité d’ordre moral en conférant à celui qui en était honoré une investiture de caractère quasiment religieux, au point que Leon GAUTHIER dans son ouvrage sur la  « Chevalerie », en arrive à la qualifier de « huitième sacrement ».
Dans le « décor » complet du grade de KADOSCH, le poignard (la dague) accompagne également l’épée. Loin d’être cette arme d’assassins que certains ont voulu voir en elle, elle était utilisée dans « les jugements de Dieu », d’où son symbole de Justice.
Ainsi le Chevalier était tenu de se porter champion des causes justes et engageait sa vie, « VAINCRE OU MOURIR » dans ces combats singuliers en champ clos (le camp) sous la surveillance de « Juges du Camp » et assisté d’un « Servant d’Armes », titre que l’on retrouve dans nos rituels du 30ème. Une autre légende, fortement contestée d’ailleurs, le ferait dériver d’un grade de vengeance « le petit élu » qui aurait été pratiqué à LYON dès 1743, mais il semble bien établi que le KADOSCH, ait pour la première fois apparu, sous ce titre, à METZ, en 1761.
Le rituel pratiqué à METZ en 1761 lui donne pour origine des Maçons qui, après l’achèvement du Temple de Salomon à JERUSALEM, se seraient retirés en « THEBAÏDE », ou ils auraient été connus sous le nom de « Pères du Désert », et qualifiés de KADOSCH (SAINTS en hébreu). On retrouve la même filiation dans un discours prononcé le 5 Mars 1813 à l’Assemblée Générale du Suprême Conseil de France, par son Secrétaire du SAINT EMPIRE, le frère PYRON.
En 1762, le « Conseil des Empereurs d’Orient et d’Occident » l’incorpore dans le système à 25 grades connu sous le nom de   « Rite de Perfection d’Hérédom » par le manuscrit de FRANCKEN, dont il était le 24ème degré.
Cette échelle de grades, placée sous l’autorité d’un « Conseil de Chevaliers KADOSCH » clef de voûte du système, sera pratiquée par : « la Grande Loge des Maîtres de PARIS » qui essayait alors de se structurer comme le centre commun de la Maçonnerie Française.
Elle sera transmise à STEPHEN MORIN par la fameuse patente portant son nom et diffusée aux Antilles à partir de 1764.
Elle deviendra le noyau et la source du R:.E:.A:.A:. lors de son retour en 1804, complétée et ordonnée en 33 degrés, avec le Frère de GRASSE-TILLY, mais dépouillée de la légende templière.
Le KADOSCH présenté, en ses débuts, comme un grade templier avec un but de vengeance aggravé par de folles prétentions à l’héritage de l’Ordre du Temple, devait désormais s’installer durablement dans la série des Grades Écossais.
La filiation lui causa d’ailleurs le plus grand tort, et dès le 21 Septembre 1766, le Conseil des « CHEVALIERS D’ORIENT » défendit expressément à ses membres de travailler au grade de KADOSCH, dénoncé comme contraire aux principes de la Maçonnerie.
En 1778, à LYON, le Convent des Gaules devait également rejeter la Tradition Templière et une résolution analogue fut prise, en 1780, par le « Souverain Conseil, Sublime Loge Mère des excellents », puis en 1782 au Convent de la « Stricte Observance » à WILHELMBAD ; enfin en 1786, quand le G:.O:.D:.F:. institua le R:.F:. en 7 grades, il lui donna pour dernier grade le R + C, en éliminant celui de Chevalier KADOSCH.
Le « CHAPTER de la KILWINNING LODGE » de DUBLIN », en sa tenue de Hauts-Grades de PRINCE Maçons CHEVALIER R + C du 13 Janvier 1782, se déclara être le plus ancien « Chapitre R + C » du monde et abandonna, lui également, en 1791 sa connotation de K:.D:.S:.H:., démarche voisine d’ailleurs de celle qui sera suivie en France, dans un contexte voisin , en constituant le grade de R + C, 7ème  et dernier grade de la progression.
Signalons enfin un essai de retour au Rite Français pour les Hauts-Grades, patronné par le Frère RAGON, aux environs de 1860 ; Le nombre de grades y était porté de 7 à 8 par l’adjonction comme dernier degré, celui de « KADOSCH PARFAIT INITIE », dit aussi « GRAND ELU, CHEVALIER de L’AIGLE BLANC et NOIR », qui tomba presque aussitôt dans l’oubli.
Notons cependant, et suite aux travaux de la célèbre Loge de recherche anglaise « QUA­TUOR CORONATI », menés en 1926, puis en 1955, la pratique importante à LONDRES depuis 1756, puis à Dublin et enfin à Édimbourg, d’un Rite en 7 degrés, importé par des français et combinant la Tradition Templière avec quelques degrés écossais ou d’origine diverses, et dont le grade sommital, à la vertu cardinale, était celui de  « Chevalier Templier », Chevalier de Palestine, K:.D:.S:.H:. ou KADOSCH (Knight of Palestine), 7ème et dernier grade.
Ce Rite en 7 degrés, décliné en 6 degrés de 3 sections et un degré en 7 sections, soit 25 au total, appelé « Rite BALDWYN de BRISTOL », encore pratiqué par les « Sides Degrees » se référait à la mémoire des Templiers, de retour de PALESTINE, au camp de II sera la base du futur R:.E:.A:.A:., comme de certains rituels « Rectifiés BALDWYN.
Le 30ème grade, CHEVALIER KADOSCH, revenu des Amériques amendé, constituera désormais « LE NEC PLUS ULTRA » du Rite, substituant à la notion de vengeance celle de réparation bien plus conforme à l’authentique esprit chevaleresque, en reprenant le symbole de l’échelle qui justifie sa place éminente dans la hiérarchie des grades initiatiques.
Pour bien comprendre les conceptions des créateurs du Grade, il faut discerner ce qu’avaient de profondément symboliques les « duels » qui ne faisaient que matérialiser l’affrontement de deux entités : la vérité – le mensonge – le bon droit – l’injustice – en somme, le bien – le mal. Avec cette lourde hérédité, porteuse de l’ambivalence de l’attrait à la fois concentré et associé au rejet, on comprend que le grade de KADOSCH ne pouvait pas laisser les Maçons indifférents.
Quelle est l’originalité du grade ?  Quelle est sa structure ?
Au grade de KADOSCH, le Chevalier Maçon travaille suivant une organisation canonique (ouverture, isolement et veille pendant que le monde profane sommeille, puis fermeture préparant allégoriquement le retour au monde profane).
Le Rite emprunte à la symbolique de la légende chevaleresque des Templiers, à leur tragédie et à leur exil en Écosse.
L’imagerie (crane, tiare, couronne...) traduit ce qui reste des oppresseurs après leur ensevelissement et la putréfaction de leurs cadavres.
L’échelle mystique ou mystérieuse (simple à 7 échelons, déjà utilisée en 1750, ou double en deux parties de 7 échelons) traduit le caché du KADOSCH, son travail sur lui-même pour aller à la découverte de ce qui lui échappe, de ce qu’il ne voit pas. À cet égard l’échelle de JACOB et son rêve biblique est très significative ; Elle lui indique l’attention qu’il doit porter aux qualités morales des individus qui conduisent l’homme vers les hautes sphères de l’esprit et aux Arts libéraux, tels qu’on les trouve dans le vieux manuscrit « REGIUS » de 1390.
La tradition chevaleresque du grade, avec ses valeurs typiques hors de toute chronologie, s’appuyant sur le respect de règles ritualisées, se présentent comme une initiation : l’homme est adoubé Chevalier, en devenant apte à centrer son courage sur lui-même et à porter l’Amour dans son cœur.
Homme d’action, également remarquable par la richesse de sa vie intérieure, le Chevalier KADOSCH se doit d’accomplir les 7 vertus pour être en harmonie intime avec le monde.
Les trois vertus théologales (la foi, l’espérance, la charité) les quatre dites cardinales (la justice, la prudence, la force, la tempérance). Cette forte idéalité chevaleresque se marie d’ailleurs fort bien avec ce à quoi s’identifie le Sublime Chevalier élu », générateur du KADOSCH, dès les années 1728/1733.
RAMSAY, dans son célèbre discours de 1737 ne citera d’ailleurs jamais les Templiers mais toujours les mêmes « Hospitaliers » liés par le secret du signe et la parole, lien respectable pour unir tous les chrétiens de toutes les nations dans une même confraternité. L’Ordre s’unit aux « Chevaliers de JERUSALEM », écrivit explicitement RAMSAY, et nos Loges portèrent alors le nom de « Loges de SAINT-JEAN »...
Cette ambiguïté, cette confusion entretenue concernant une hypothétique fusion, se renforcera en avec le développement des grades templiers en Allemagne, et particulièrement avec ceux de « la Stricte Observance Templière » du Baron VON HUND qui fit prospérer son système durant la décennie 1750.
En 1761, MEUNIER de PRECOURT, le messin, écrivit à WILLERMOZ, le lyonnais, pour l’informer qu’il avait eu connaissance par l’Allemagne de « mille secrets merveilleux » propres au grade de KADOSCH.
Par la suite, tout ce qui allait entrer dans la mouvance de WILLERMOZ, peu convaincu du rituel de KADOSCH adressé, se teinta de l’opposition farouche à ce grade dans le milieu très conservateur et clérical de l’époque.
La voie lyonnaise finit par réformer « la S:.O:.T:. » qui deviendra en 1774 le Régime Ecossais Rectifié (R:.E:.R:.), en 4 grades, excluant et défendant la pratique dans les Loges sous les peines les plus graves de toute espèce de grade d’ « ELU », de « Chevalier K:.S:.» et les grades qui leur ressemblent, les jugeant dangereux et contraires au but et à l’esprit de la Franc- Maçonnerie.
C’est ainsi, que la Maçonnerie Lyonnaise se privait d’une voie légendaire qui aurait pu l’aider à penser. Une très grande fantaisie a présidé à la rédaction des différents rituels du grade qui ont existé Comme nous le verrons un peu plus loin. C’est ainsi par exemple, qu’un rituel de 1838 va jusqu’à affubler les officiers de costumes, voire d’armures. En réaction contre de telles exagérations, d’autres rituels remaniés poussèrent la simplification jusqu’à la mutilation.
Le KADOSCH entre cadrage religieux et voie hermétique vers une poussée humaniste et philosophique.
 
Sous l’influence de la culture des Lumières, le 30ème grade de Chevalier Kadosch, va, avec l’actualisation du R:.E:.A:.A:. le développement des Sciences de l’esprit, de la philosophie rationaliste et positiviste, mettre de l’ordre dans la pensée maçonnique. VUILLAUME, dans son essai sur la Franc-Maçonnerie écrit clairement vouloir véhiculer l’initiation ésotérique dans la présentation d’une Maçonnerie empreinte d’hermétisme. Il présente le KADOSCH, consacre à l’échelle mystérieuse une place importante et en donne une planche à lecture hermétique, utilisant un alphabet de 24 lettres ou chacune, dans un cryptage un peu compliqué, correspond à un nombre.
Enfin chez DELAULNAYE, on y retrouve des traces manifestes de l’esprit des Encyclopédistes, celles du travail critique et favorable à la voie ouverte en direction de la connaissance (travail rationnel sur l’hébreu suite à la grande confusion qui régnait dans les cahiers manuscrits), et quelques divergences dans la mise en pratique du 30ème grade de KADOSCH, donné par communication.
Un peu plus tard, dans les années 1850, le grade de KADOSCH ne pouvait échapper à la règle de socialité du temps et évoluait vers une laïcisation progressive de l’Ordre, de plus en plus clairement engagé dans le siècle, pour conférer l’harmonie à l’Homme vivant en société civilisée. Et voilà que pouvait advenir la promesse d’être un bon Chevalier, en l’occurrence un « Chevalier de l’Humanité ». Avec la République rétablie et son esprit laïque conforté, puis la rupture définitive avec toute obligation « dogmatique », en 1877, le Chevalier KADOSCH finit par se présenter comme celui d’une « Sainteté Sociale », sachant qu’entre temps les Hauts-Grades avaient définitivement réussi à sauver leur peau au G:.O:.D:.F:..
En 1874, parut sous l’autorité du Chevalier FABIEN, un rituel au « 30ème grade de KADOSCH Ancien », mis au goût du jour par une « pratique moderne », axé sur la religion mais aussi très désireux de « coller » avec le siècle, on retiendra comme élément caractéristique, l’évolution de l’échelle mystérieuse, la montée par les échelons se rapportant à des qualités (la fermeté, la persévérance, la fermeté...), le sommet du « NEC PLUS ULTRA », et la descente selon « l’Amour de Dieu » et des préoccupations de la bourgeoisie d’alors (l’agriculture, l’industrie, le commerce, la politique.             
Le rituel de 1914 est établi dans un esprit très laïc, sans échelle, ni vengeance, ni religion, et une allégorie qui se limite à rappeler que les KADOSCH veillent de l’entrée de la nuit au point du jour ; vigilance donc pendant que le reste de l’humanité ne se méfie pas des risques qu’elle encourt. Le retour vers le Sacré symbolique, après la première guerre mondiale, il fallait que l’esprit humain et son inexpugnable hermétisme retrouvassent Droit de Cité dans l’Ordre Maçonnique ; Il fallait aussi que la pensée hermétique remontât la pente...
Armand BEDARRIDE,[1] dans les années 1920/1930, chercha à faire part de sa conception du KADOSCH. Il insista, pour ne froisser personne, sur la vision du grade strictement morale et philosophique, et sut réintroduire les références hermétiques, alchimistes et symboliques dans le grade de KADOSCH. Il réintroduira l’échelle vue comme l’approfondissement d’une ascension pour développer un enseignement ésotérique, évocation des Templiers sous le vocable de « CHRÉTIENS ÉSOTÉRIQUES », qui l’amènera à faire du KADOSCH un degré ou le mysticisme très enfoui prévaut sur le mystère, ou il importe de « faire éclore le Divin dans l’humain », sachant que, surtout depuis ANDERSON, la Maçonnerie est une « culture spirituelle » dans sa forme la plus dépouillée.
À partir de la fin de la seconde guerre mondiale, en 1946, le KADOSCH est ouvertement mis en mots au sein du R:.E:.A:.A:., alors que jusque-là, le « PARFAIT INITIÉ » demeurait expurgé d’une symbolique manifeste. Le rituel de 1956 conservait les traces de son passé avec une étoile à 7 branches significative des 7 qualités énoncées correspondant aux 7 échelons de l’échelle mystique pour parvenir après efforts au « NEC PLUS ULTRA », au suprême de l’enseignement initiatique, de son évolution, dont la finalité consiste à « combattre la superstition et le fanatisme ».
Dans sa version de 1969, la finalité s’est précisée dans le climat du temps. C’est la « résistance à l’oppression » qu’on évoque. C’est le retour à l’échelle à deux volées de 7 échelons, la volée de droite faite de vertus, la volée de gauche des sciences physiques et morales.
L’année 1981, posera l’allégorie du grade d’action, en montant la même échelle, en franchissant d’abord la volée des disciplines, puis en descendant celle des qualités vertueuses, pour aboutir à la sagesse.
Dans la version de 1992, celle en vigueur de nos jours, le KADOSCH, qui vit dans le siècle, doit apprendre à se détacher des contingences et à se distancier suffisamment de ses pulsions narcissiques, afin d’admettre que son point de vue est si relatif qu’il implique la tolérance à l’égard d’autrui. Dans le même temps, il doit aussi assumer une vigilance constante pour accomplir son devoir sans esprit de vengeance.
Le KADOSCH est invité à se conformer à la devise : « FAIS CE QUE DOIT, ADVIENNE QUE POURRA ». Cette devise, transmise par les chansons de geste et les romances de la Chevalerie « FAIS QUE DOIS, AVIEGNE QUE PUET », adage impératif pour le Chevalier, champion du Droit et du Bien contre l’Injustice et le Mal. Connaissant cette tradition, les Maçons du XVIIIème siècle savaient donc bien ce qu’ils faisaient en considérant qu’ils ne pouvaient mieux honorer un initié parvenu au « NEC PLUS ULTRA » qu’en le consacrant CHEVALIER, forme médiévale de l’accession aux « GRANDS MYSTÈRES ».
De « PRINCE ROSE CROIX » à la dignité temporelle, il devenait KADOSCH à la dignité spirituelle[2]. Sa parfaite initiation s’appuyait sur la reconnaissance matérialisée comme telle. La spiritualité et la tradition y ont toute leur place, au même titre que les exercices les plus propres au développement des Savoirs et de la Société.
Le Chevalier KADOSCH s’identifie ainsi à la Maçonnerie ; Il doit être, nous dit Pierre NOE, courageux dans le quotidien et sublime dans l’ordinaire ; Ce n’est pas un Homme qui se soumet ; C’est un Homme dynamique, conscient que la Franc-Maçonnerie se doit d’être une utopie en action, seul moyen qui lui permet d’agir sur le monde et de remplir sa mission... Et au cas où nous serions tentés de refuser cet héritage venu d’un âge révolu, demandons-nous Frères Chevaliers KADOSCH d’aujourd’hui, si notre Société contemporaine est arrivée à un niveau de perfection suffisant pour que le besoin n’existe plus de préparer des défenseurs pour « LA VEUVE, L’ORPHELIN ET L’OPPRIMÉ », des champions pour « LA VÉRITÉ, LA JUSTICE ET LE BIEN », de former des Hommes pour « l’Ordre des SAINTS », comme le faisaient au XVIIIème siècle. L’Ordre des Chevaliers avec leur code d’honneur, et leur devise « SANS PEUR ET SANS REPROCHE ».
Le principe qui ordonne les Grades de cette collection fait référence à l’article 4 (Décret 07 du 02-09-03) de la constitution du Grand Chapitre Général du Grand Orient de France.
Le 5ème Ordre – Sera reconstitué le 24 octobre 1999 : en référence aux anciens règlements fondateurs de 1784 du Grand Chapitre Général et prendra toute sa signification à la lecture des statuts et règlements généraux rédigés par ROËTTIERS de MONTALEAU ainsi rédigés : « Il comprendra tous les grades physiques et métaphysiques et tous les systèmes, particulièrement ceux adoptés par les Associations Maçonniques en vigueur ». En conséquence, il communique les enseignements de tous les grades sommitaux de tous les Rites et exige pour y parvenir, outre des critères rigoureux impliquant de hautes valeurs morales, un cheminement progressif en 4 ordres, dans le respect de la tradition et la considération de la modernité.
Terminons  enfin ce chapitre de l'ouvrage sur le 5ème Ordre du Rite Français, qui fonctionna d'avril 1784 à décembre 1787, avec 43 Assemblées de 27 membres, sous la Présidence de ROËTTIERS de MONTALEAU, et qui fut réveillé, restauré et transformé  en 1999.
Je conclurais en livrant à votre réflexion ce court extrait d’un rituel manuscrit du 4ème Ordre du R:.F:. de 1784 : Toutes les connaissances maçonniques et l’application qu’on peut en faire, sont donc renfermées dans les trois premiers grades dénommés symboliques, mais il a été nécessaire pour faciliter le travail de ceux qui aspirent à la découverte de la liberté, d’établir des classes (ordres) dans lesquels on peut donner une espèce de développement aux emblèmes qui s’offrent de toute part dans les trois premiers grades, sans cependant en tirer le voile entier. Ce texte montre bien qu’il n’est pas nécessaire de poursuivre le chemin maçonnique au-delà de la Maîtrise pour être un bon Maçon, mais il indique aussi, clairement, que les ordres de sagesse du R:.F:. permettent à tout Maître Maçon volontaire d’aller plus loin dans la recherche de la Vérité et dans le travail qu’il mène, au sein du G:.O:.D:.F:. , pour établir une société plus juste et plus éclairée. Enfin et comme l’écrivait en écho, un Grand Vénérable du G:.C:.G:. (Jean Pierre LEFEVRE) :
« Les ordres de sagesse ne sont jamais supérieurs les uns aux autres mais différents, selon l’expression de VICTOR HUGO « que le mieux n’est trouvé que par le meilleur ». Le parfait Maçon libre trace ainsi son itinéraire entre l’abscisse du doute et l’ordonné de la Vérité, ce qui lui permet de rester fidèle à son engagement et lucide envers lui-même.
Le grand projet de société imaginé par nos devanciers du temps des Lumières, de 1717 à Londres, refusait déjà la médiocrité d’une pensée unique, pour s’inscrire dans la modernité. En nous réappropriant cette mémoire nous devenons acteurs vivants de ce grand projet de société. Nous avons repris possession de notre héritage, il nous faudra le conserver et le transmettre aux générations futures. Tel est notre devoir pour la plus Grande Gloire du Grand Orient de France.
Aujourd’hui, tout Franc-Maçon du G:.O:.D:.F:., titulaire du grade de Maître depuis au moins trois ans, peut aspirer à rejoindre les Ateliers de Perfectionnement. Il ne s’agit, bien sûr, que d’une possibilité offerte et en rien une obligation.
Dès la création du GRAND ORIENT et jusqu’à nos jours, il existe au sein de l’Obédience un courant qui professe que les trois premiers grades contiennent l’intégralité de l’enseignement maçonnique pour celui qui sait travailler vraiment. Cette position est tout à fait légitime. Pour d’autres, qui souhaitent explorer d’autres perspectives, il existe deux façons d’entreprendre cette démarche aussi valide l’une que l’autre. La candidature d’un de ses membres peut être proposée par la Loge symbolique à un Atelier de Perfection, et des FF:. membres d’un Atelier de Perf. Peuvent y présenter la candidature d’un F:. Maître.
Dans tous les cas, le candidat devra joindre au dossier une lettre de son V:.M:. attestant de son assiduité en Loge bleue et du fait qu’il est en règle avec le trésor de son Atelier.
Son parcours personnel pourra se faire dans l’une quelconque des Structures de Rites réunis au sein du G:.O:.D:.F:., patrimoine maçonnique d’une très grande richesse, où chacun pourra prolonger les droits acquis au grade de Maître.
Je les cite pour mémoire : Le Grand Prieuré indépendant de France du G:.O:.D:.F:.   (R:.E:.R:.), ( 1776 ).
Le Grand Chapitre Général du G:.O:.D:.F:. – R:.F:.(1782). Le Suprême Conseil du Grand Collège du G:.O:.D:.F:. – R:.E:.A:.A:. (1804). Le Grand Ordre Égyptien du G:.O:.D:.F:. (1999). Rite Ancien et Primitif de Memphis « Rectifié en 33 degrés », par les FF:. Jean-Louis DEBIASI et feu Ludovic MARCOS-†, d’après des rituels kabbalistiques issus de l’Ordre Hermétique de la Golden Dawn.
Le Suprême Grand Chapitre de l’Ancienne Maçonnerie d’YORK, Maçonnerie de la Marque et de l’Arche Royale du G:.O:.D:.F:.  pratiquée entre 1817 et la seconde République principalement par des FF:. qui en avaient été revêtus aux États Unis à la fin du XVIIIème siècle.
[1]    Armand BÉDARRIDE est un Avocat et Franc-Maçon Français, né au Pré-Saint-Gervais le 24 avril 1864 et mort à Marseille le 5 décembre 1935.
[2]    Tuileur de VUILLAUME de 1820.

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